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Tu as plus de 300 000 ans!

22 novembre 2017 - Charles Prémont

L’humain est apparu 100 000 ans plus tôt qu’on pensait. Il a vécu en même temps que d’autres espèces humaines. Et on comprend mieux ses origines.

La découverte

Les paléontologues pensaient que l’être humain était apparu il y a 200 000 ans dans le nord-est de l’Afrique, une région correspondant à l’Éthiopie aujourd’hui. Or, des fossiles humains plus vieux de 100 000 ans ont été découverts au Maroc en juin dernier, par l’équipe du paléoanthropologue français Jean-Jacques Hublin. Comment sait-on qu’ils sont plus vieux? Ces humains fossilisés ont été retrouvés avec leurs outils en silex. Et les scientifiques ont réussi à dater ces outils : ils ont 300 000 ans!

Ces fossiles ont été déterrés au site archéologique de Jebel Irhoud, à 90 km au nord-ouest de Marrakech, au Maroc. Ce site était pourtant bien connu des archéologues : il a été découvert en 1960 par hasard par des mineurs. Malheureusement, à l’époque, les méthodes de fouilles et les techniques de datation n’étaient pas aussi avancées qu’aujourd’hui. On avait donc évalué que les fossiles humains trouvés avaient environ… 40 000 ans!

Toutefois, passionné par ce site, Jean-Jacques Hublin est resté convaincu qu’un secret s’y cachait toujours ! Son équipe et lui débarquent donc à Jebel Irhoud en 2004, où ils finissent par découvrir ces fossiles humains et des outils en silex.

Illustration : Frefon

Une mini-révolution

Avant cette découverte, les paléontologues considéraient qu’Homo sapiens avait émergé sur la côte est africaine. En dénichant de très vieux fossiles dans la partie ouest du continent, les scientifiques estiment maintenant que notre espèce était beaucoup plus répartie en Afrique. Mais surtout, cette découverte nous aide à mieux comprendre d’autres fossiles mystérieux. Ceux-ci ressemblent à des Homo sapiens, mais ils sont beaucoup trop vieux pour en être. Maintenant qu’on sait qu’Homo sapiens est plus ancien, ces fossiles retrouvent une place dans l’arbre généalogique humain.

Ils sont comme la pièce d’un casse-tête qu’on pose et qui permet de placer, d’un seul coup, toutes les pièces récalcitrantes. « Avant, on imaginait qu’Homo sapiens s’était développé dans son coin et qu’il s’était ensuite propagé rapidement sur la planète, explique le professeur Julien Riel-Salvatore, paléoanthropologue à l’Université de Montréal. Or, il y a 300 000 ou 400 000 ans, plusieurs autres hominidés vivaient sur Terre. Si nous sommes apparus à cette époque, nous les avons peut-être rencontrés! »

300 000 ans, c’est sûr?

Non ! Et notre compréhension des origines humaines va encore changer. « Il y a peu de chance qu’on arrive un jour à tout savoir sur nos origines, explique Julien Riel-Salvatore, simplement parce que tous les hominidés n’ont pas laissé de fossiles ou que tous les outils n’ont pas été préservés. On devra toujours combler certains trous avec des hypothèses. C’est la nature même de la démarche scientifique en paléontologie : on rassemble le plus de certitudes possible pour toujours mieux comprendre les choses. »

Ces nouvelles découvertes viennent aussi de l’amélioration des techniques de fouille et de datation, ainsi que d’autres disciplines scientifiques, comme la paléogénétique.

« Ce qui est incroyable avec la paléogénétique, c’est qu’on extrait de l’ADN humain des sédiments (le sable normalement jeté par les archéologues), dit Julien Riel-Salvatore. Cela nous renseigne sur les maladies des individus, leur lignée, la densité de leur population. Ça nous permet aussi de savoir si des espèces différentes d’hominidés se sont reproduites entre elles. »